Août 1917

Le mercredi 1er août 1917.

A 7 h allumage des feux. A 11 h nous quittons Rio Grande Do Sul. Beaucoup des gens de la compagnie sont sur le remorqueur qui nous escorte jusqu'à la sortie de la barre et nous salue au passage. "L'ernest" prend la tête de l'escadrille puisque le Commandant est à bord. Nous partons avec un beau temps, tout va bien. Nous avons vent arrière. Étant chef de quart je ne fais pas le quart la nuit sauf quelques rondes.

Le jeudi 2 août 1917.

La mer est devenue furieuse d'un seul coup, hier soir il faisait beau mais aujourd'hui il n'y a pas moyen de tenir. "L'Ernest" est boulé par la mer, l'eau embarque partout. Jusqu'à midi je travaille après je ne réponds plus de moi, je suis affligé du mal de mer. Depuis très longtemps je ne l'ai pas eu mais aujourd'hui ça peu compter. La mer devient de plus en plus furieuse, nous sommes obligés de relâcher et de faire cap au vent et à la lame. Il est des moments ou je crois que le navire est perdu dans la tempête. Nous sommes inondés partout à bord. La mer est sans pitié.

 

Le vendredi 3 août 1917.

Même temps qu'hier et même existence. Nous vivons sous l'eau, des paquets de mer. Je ne vomis pas aujourd'hui mais je ne puis manger non plus. Toute l'escadrille est dans le même embarras que nous.

 

Le samedi 4 août 1917.

La mer est toujours aussi méchante, nous faisons toujours cap à la lame. Je ne puis pas encore manger aujourd'hui.

 

Le dimanche 5 août 1917.

Il commence à faire un peu plus beau aujourd'hui mais ça chahute encore. Le soleil daigne enfin se montrer, nous cherchons notre route depuis hier. A midi nous relevons le point et mettons le cap dans la direction de Rio Grande. Nous croisons un paquebot faisant la même route que nous vers 15 h. Depuis ce matin au petit jour nous sommes en vue de la terre et cherchons à le reconnaître. Ce n'est qu'à midi à la hauteur du soleil que nous avons pu compté sur l'exactitude. Vers 19 h 30 nous apercevons les feux de la ville de Rio Grande ainsi que le feu de l'entrée de la barre. Nous restons devant et faisons des cercles en attendant un nouvel aurore. Je commence à manger ce soir.

 

Le lundi 6 août 1917.

Dès qu'il fait jour nous prenons la direction de la barre pour entrer dans la rivière de Rio Grande. A 11 h nous arrivons au mouillage aux quais de la compagnie française de Rio Grande. Repos des équipages l'après-midi.

 

Le mardi 7 août 1917.

Réparations diverses dans la machine et la chaudière ainsi que dans le bateau.

 

Le mercredi 8 août 1917.

Même chose que la veille. Je vais à terre et rentre vers 21 h. La ville est morte le soir.

 

Le jeudi 9 août 1917.

Briquage de hamac, lavage de linge. Travaux divers à la machine et à la chaudière.

 

Le vendredi 10 août 1917.

Rien de nouveau. Il fait très froid.

 

Le samedi 11 août 1917.

Nous embarquons le charbon à bord. Complet d'eau.

 

Le dimanche 12 août 1917.

Travail toute la journée. Démontage à bord.

 

Le lundi 13 août 1917.

Il fait de plus en plus froid dans ce pays, il y a de la gelée blanche sur le pont le matin.

 

Le mardi 14 août 1917.

Allumer les feux à 11 h. Vers 16 h je balance la machine. Les feux sur l'avant.

 

Le mercredi 15 août 1917.

Pousser les feux à 6 h. A 8 h appareillage de Rio Grande Do Sul. Nous quittons le chenal vers 10 h 30, nous longeons la côte, il n'y a que des dunes de sable. La mer est houleuse.

 

Le jeudi 16 août 1917.

A la mer. Nous suivons toujours la côte, toujours des dunes. La mer est houleuse comme hier.

 

Le vendredi 17 août 1917.

Nous suivons toujours la côte, nous croisons plusieurs vapeurs. Toute l'escadrille est avec nous.

 

Le samedi 18 août 1917.

Enfin nous quittons les dunes pour voir la côte sous un autre aspect. Les montagnes réapparaissent, nous croisons encore quelques bateaux.

 

Le dimanche 19 août 1917.

A 8 h on nous donne liberté de manœuvre pour relier Santos. La mer est belle. Nous augmentons l'allure et prenons la tête avec le remorqueur "Narval". A 18 h nous croisons un cargo français, il nous appelle par le porte voix et nous dit qu'il nous signalera à bord du croiseur "Marseillaise" par radio. A 18 h 30 nous sommes en face de l'entrée de Santos. Nous stoppons et mettons les feux sur l'avant. A 19 h 30 un pilote vient prendre et rentrons dans la rivière. A 21 h 30 nous sommes au mouillage près de la "Marseillaise" en rade de Santos. Bas les feux à 22 h. Distance de Rio Grande Do Sul à Santos: 615 milles.

 

Le lundi 20 août 1917.

Au mouillage en rade de Santos. Embarquement de charbon 12 tonnes, d'huile. Ici il fait moins froid qu'à Rio Grande Do Sul.

 

Le mardi 21 août 1917.

Appareillage de Santos à 15 h 15. Le croiseur "Marseillaise" appareille avec nous et nous accompagne. La mer est houleuse un peu.

 

Le mercredi 22 août 1917.

La mer est aussi houleuse qu'hier, nous mettons une voile devant, nous avons vent arrière.

 

Le jeudi 23 août 1917.

La mer est de plus en plus houleuse, nous passons au large de Rio de Janeiro vers 6 h. Je reconnais la montagne du pin de sucre qui forme l'entrée de la rade. Nous croisons deux vapeurs en route. Toute l'escadrille de remorqueurs et porteurs est avec nous et comme nous bien balancée par la mer.

 

Le vendredi 24 août 1917.

 

Même temps qu'hier, le pont arrière est toujours inondé. Nous croisons un petit voilier pêcheur de baleines.

 

Le samedi 25 août 1917.

La houle se dissipe un peu dans la soirée. La "Marseillaise" nous envoie des vivres avec un canot.

 

Le dimanche 26 août 1917.

La mer est redevenue méchante et nous sommes encore secoués. Nous croisons un vapeur Anglais.

 

Le lundi 27 août 1917.

Le vent souffle toujours très fort la mer est agitée, mauvais temps pour la navigation sur ces petits bateaux.

 

Le mardi 28 août 1917.

Nous arrivons au mouillage à 14 h en rade de Bahia. Le vent souffle toujours, nous nous mettons à l'abri près des quais. Il pleut à torrent. Je vais à terre de 18 h 30 à 21 h. La ville est mal éclairée et pas très jolie le soir. Il y a beaucoup d'églises dans ce pays. Distance de Santos à Bahia: 920 milles.

 

Le mercredi 29 août 1917.

La pluie ne cesse de tomber. J'entreprends des démontages dans la machine. Embarquement de charbon, 16 tonnes.

 

Le jeudi 30 août 1917.

Je descends à terre l'après-midi pour faire des achats, étant é‚signé par le Commandant. Je rentre vers 18 h et redescends, permissionnaire jusqu'à 21 h.

 

Le vendredi 31 août 1917.

Il pleut encore un peu aujourd'hui mais moins que les jours précédents. J'ai du travail en quantité et veille le soir.

 

Date de dernière mise à jour : 14/09/2020

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