Février 1916

Le mardi 1er février 1916.

 

Branle-bas à 5 h 15. Lavage de linge et des grands sacs, briquetage de bancs et table. Je peux laver quelques morceaux de linge et je les mets sur un cartahu. (Cordage pour hisser un objet). Aujourd'hui tribord double de quart, les bâbordais double de terre, je suis de quart aux treuils. Le cargo norvégien "Jose" largue l'amarre et appareille à 14 h, il a fini le débarquement de marchandises et l'embarquement de charbon. Vers midi des hommes de l'équipage se baignent le long de leur bord, beaucoup plongent de dessus le pont. Les doudous viennent à bord comme d'habitude, le matin de 10 h 45 à 12 h et de 18 h à 18 h. Des marchands de chaussures et de mercerie viennent aussi offrir leurs marchandises, aujourd'hui j'achète trois tricots de coton, car ils sont moins chauds que mes tricots réglementaires et c'est beaucoup plus facile à laver. Je les paie one shilling six pences, la pièce, quatre shillings six pences les trois. Aujourd'hui à 13 h paiements de l'équipage. Les hommes sont payés en argent Anglais. Je touche une livre sterling et une demie livre sterling, la livre est en billet de banque de la coloniale de la Jamaïque, "colonial bank jamaïque" et la demi-livre est en sterling. Il faut 12 stg pour une demi-livre, elle est évaluée à 27 F 96 en argent Français et en Anglais elle ne vaut que 25 F Le sterling vaut 1f 20. Il y a aussi le florin qui vaut 2 stg. La paie fini à 15 h 30 les permissionnaires de la 2ème division vont à terre jusqu'à 17 h A 16 h un cargo norvégien arrive et prend le quai au près de nous en travers des deux appontements disposés pour. Entre ces deux appontements il y a un vivier à tortues de mer, trois nègres descendent dans le vivier et s'emparent d'une des habitantes, et la sorte sur le quai, elle est énorme et les trois nègres en ont assez pour la soulager. Elle n'est pas faite comme les autres, elle est plus plate, je n'en avais pas vu d'aussi plate. Le vent s'est levé vers 17 h et il y a un peu de clapotis en rade. Il y a lavage de peinture partout le bord intérieur et extérieur. Il fait bon cette nuit, les sabords sont toujours ouverts, comme ça on peut se reposer car après des journées pareilles ! De 5 h à 17 h 45 on peut avoir besoin de repos. Je ne sais si ce service existera longtemps à bord mais en tout cas il est bien fatigant. La plupart des hommes ne pourront certainement pas étaler.

 

Le mercredi 2 février 1916.

 

Le branle-bas à 5 h 15. Aujourd'hui je suis de terre, je mets mon nom sur la liste. Dans la matinée le croiseur Anglais H.M.S. "Léviathan" battant pavillon amiral appareille. A 14 h je descends à terre. La ville de Kingston est très jolie, très riche. Je suis seul et en profite pour aller où bon me semble. Ne connaissant ni le pays ni la langue je m'enfonce dans la première rue, elle est large et aussi très longue. Il fait énormément chaud à terre, sur rade il fait un peu de vent, à terre aussi mais beaucoup moins. Les rayons du soleil frappent durs. Je m'arrête en route dans un grand hall ou l'on vend de toutes sortes de choses, fruits, viande, poissons, mercerie c'est le marché indigène, c'est assez vaste, les locaux sont longs et larges. Je rencontre plusieurs grandes places, le railway passe dans cette rue et la continue dans toute sa longueur. Pendant plus de 2 kmts il y a que des boutiques de toutes sortes, à un passage, sans doutes le centre de la ville il y a de grands magasins, Fort bien aménagés. Ensuite après la fin de toutes ces petites boutiques, des petites maisons bourgeoises, châtelets et villas ont toutes un genre spécial, c'est coquet et bien abrité car devant et derrière chacun se trouve planter des arbres de toutes sortes qui ombragent entièrement l'habitation. Au bout d'une heure de marche je me trouve en face de deux routes, le railway va à gauche et moi je tourne à droite, cette route que je viens de prendre m'emmène aux pieds de la montagne. Par ici il y a quelques villas mais moins que dans la rue qui m'a amené par-là Il y a des champs et des bois, des arbres dont les branchages fleuris paraissent comme de l'aubépine rouge, des plantes grasses font beaucoup la séparation des champ ou des jardins avec des rames artificielles. Je passe dans un champs au bord d'un bois où il y a une haie de plantes grasses, ces plantes sont hautes à cet endroit de plus de 5 mts, elles se dressent comme des troncs d'arbres. Enfin vers 16 h 30 je rentre dans le faubourg de Kingston, mais pas par la même route, je suis toujours le bas de la montagne, je presse un peu le pas et j'arrive vers 17 h en face de la grève, je suis arrivé dessus sans m'en apercevoir qu'à une distance de 300 mts, le terrain des alentours et de Kingston est très plat. La vue de la mer m'était caché par des cocotiers et d'autres grands arbres dont je ne connais pas encore leur nom. Je m'oriente en regardant les navires qui sont en rade et je m'aperçois que je suis loin du quai où la "Marseillaise" est accostée. En route dans une rue je rencontre un noir qui parle un peu le Français, lui-même m'interpelle, voyant ça j'en profite pour lui demander quelques tuyaux. Je lui demande d'abord le nom d'un hôtel ou je pourrais satisfaire mon petit appétit car j'ai sensiblement faim avec cette promenade, j'ai Fort soif aussi, ne sachant pas un mot D'Anglais je lui demande le nom des boissons du pays. Il me renseigne et me dit, il y a du soda, bière, limonade et kola, les trois premières coûtant chères, 6 pences la pièce, je lui demande ou je pourrais me faire servir pour me désaltérer, pas bien loin me dit il et m'indique une petite boutique et je me fais servir un "kola" je paie cette consommation 3 pences, j'achète aussi des cigarettes, je paie une boite trois sous Anglais avec une boite d'allumettes, c'est du tabac jaune. Comme en Angleterre on trouve des cigarettes et cigares dans tous les débits de boissons. Les allumettes et cigares et cigarettes ne subissent pas le contrôle de l'état pas plus que le tabac, je crois même qu'il n'y a pas de droits de contributions. Il y a des maisons à Kingston où l'on fabrique les cigares et cigarettes. Quand je reviens en ville, tous les magasins sont fermés, je m'en étonne et bientôt j'apprends qu'à 16 h toutes les grandes maisons ferment à cette heure là. Je m'enquête de nouveau pour trouver un hôtel et bientôt je suis installé au Britania Hôtel. Je suis servi par des noires, je demande un kola, je suis servi avec empressement, mais pour manger il n'en est plus de même car elles ne connaissent pas un mot de Français, mais une des deux noires va chercher le patron de l'hôtel, lui comprend ce que je lui demande, mais parle très peu le Français aussi, enfin je lui explique et il me fait servir. Le dîner est servi un quart d'heure après, c'est un dîner qui ne vaut pas celui que j'ai fait à Fort de France avec ma doudou, enfin c'est la mode du pays et le menu est ainsi conçu. Omelette, jambon, bifteck, quelques oranges et bananes et aussi de la salade, comme boisson du thé au lait, café, on offre du rhum du pays comme je ne bois pas d'alcool je refuse, pourtant il faudra que je goûte ce rhum tant renommé. Je paie pour le dîner 2 shillings, ce n'est pas trop cher pour le pays mais pour le même prix en France j'aurai eu le double. Ensuite je fais une petite promenade en ville, tous les magasins sont toujours fermés. Je vois et remarque le mouvement du soir, il est moins intense que le jour dans certains endroits et dans d'autres plus bruyants. La ville est éclairée au gaz et à l'électricité. Les railways marchent toujours ce sont de très belles voitures, dans le genre des baladeuses parisiennes au lieu d'être remorquées comme celles ci, elles sont munies des accessoires pour la traction, le mécanisme est électrique et actionné par un trolley et aérien. Pour 19 h comme tous les permissionnaires je rentre à bord. Aujourd'hui pour la première fois ce midi nous touchons du pain de terre c'est du pain de fabrication Anglaise, il n'est pas comme le notre et il n'a pas le même goût non plus. C'est du pain serré et quand on, le mange il est comme une éponge, n'étant pas habitué à ce pain moi comme tout l'équipage j'en suis vite content. Le vent souffle Fort ce soir.

 

Le jeudi 3 février 1916.

Le vapeur norvégien qui était près de nous hier est parti, sans doute hier tantôt. Dans la matinée le vapeur américain "Neptune" de New-York vient prendre sa place pour charbonner et il part vers 18 h Il fait chaud toute la journée, le matin il y a un peu de clapotis en rade. Le soir vers 19 h 30 une vedette suivie d'une chaloupe ramène à quai des excursionnistes. En passant près du bord il échange avec nous des cris d'enthousiasmes, hip, hip, hourra; Par politesse nous leur répondons. A 20 h un Yack américain rentre en rade et mouille l'ancre pas très loin de nous. Le branle-bas a eu lieu de 5 h 15 ce matin et la mise à l'ouvrage est 1 h après, jus qu'à 10 h 45. Le tantôt de 13 h 45 à 17 h 45, le branle-bas du soir est à 19 h, il se fait après le poste de sécurité ou le poste de combat, car presque tout les soirs il y à un exercice. Les sabords sont tous ouverts toute la nuit, les nuits sont fraîches et il fait bon de se reposer, il fait bon dans les batteries mais il faut avoir soin de se munir de ceinture de flanelle.

 

Le vendredi 4 février 1916.

Le branle-bas est à 5 h 15. Lavage de linge et d'une couverture, hier il y a eu permissionnaires choisis, qui ont été au cinéma à Kingston, ils sont allés et revenus accompagnés de gradés. Aujourd'hui permissionnaires 1 ère division. Dans la journée il y a de nombreux exercices, mais jusque là ils ne concernent pas la machine, ça viendra peut-être mais le travail ne manque pas en bas, il faut qu'il se fasse avant autre chose. En face de nous au même appontement un petit voilier de la Jamaïque, décharge des barriques d'huile. Les doudous n'ont pas cessé de venir à bord depuis que nous sommes arrivés. Elles viennent toujours aux même heures et repartent de même. Le casque est toujours obligatoire depuis 8 h à 17 h 30. Il est expressément défendu de monter sur le pont sans l'avoir sur la tête. Depuis trois jours, le midi nous avons la charlotte comme repas, je ne sais si cela va durer, ça change un peu du rata mais tous les jours ça devient lassant. La charlotte c'est une gamelle en fer battu dans lequel, chaque plat est préparé à son idée, les pommes de terre, on les coupe comme des frites et quand on peu avoir un oignon et de l'ail ou une carotte on en agrémente la fameuse charlotte, ce n'est pas mauvais mais trop souvent ne vaut rien. A la cambuse on met de la viande de bœuf, les morceaux sont pesés et mis dans les charlottes par les cambusiers c'est cuit au four de la boulangerie, le soir il y a comme de coutume un vieux rata des familles ou du bœuf bouilli avec des pommes de terre en robe, ou une broche, (toujours du bœuf) cuite au four avec des pommes de terre en robe également. Enfin comme dessert, le midi ou le soir il y a des fruits, soit des oranges, des bananes, ou des pruneaux au vin ou des confitures. Des fois au lieu d'avoir du dessert il y a un hors d'œuvre, soit des sardines à l'huile ou des maquereaux à l'huile, du pâté, je marque le pluriel parce que comme nous sommes huit au plat il y a huit oranges, bananes, ou sardines ou demi-maquereaux ou enfin ce qu'il y a, cela fait une pièce pour chacun. Les pruneaux et la confiture pour ça on se partage, ce n'est pas très difficile à faire la part qui revient, chaque hommes, ça ne risque pas de l'étouffer. Tous les midis nous avons le café, je ne sais s'il est fait dans les mêmes conditions que le jus de matin, celui du matin n'est pas très excellent mais je le trouve meilleur que celui du midi. C'est peut-être aussi que j'ai le goût plus ou- moins délicat, enfin je ne sais pas au juste mais il ne vaut pas un bon vieux moka comme j'aime en savourer après déjeuner dans un bar parisien. Les permissionnaires de la 1 ère division partent à terre à 14 h A 14 h 30 un télégramme de l'amiral Anglais est intercepté à bord, les permissionnaires sont rappelés, des patrouilles du bord vont les chercher, puis les policemens de Kingston ont tous un bout de papier sur lequel est marqué: Marseillaise appareille, rejoindre le bord le plus tôt possible. A 15 h on allume les feux. Les doudous viennent à bord de 17 h à 18 h Dans l'espace d'un quart d'heure il ne leur reste plus rien de marchandises. Plusieurs d'entre elles retournent en chercher, c'est le même coup, de suite elles vendent tout. A 18 h 30 les derniers permissionnaires sont rentrés, le pilote est embarqué, l'amarre est larguée et nous appareillons. L'heure est retardée de 21 minutes au départ. Les doudous sont sur l'appontement et crient hip, hip, hô yes, à plusieurs réponses, puis nous nous éloignons. Dans l'après-midi nous avons embarqué neuf bœufs ils ont des cornes, longues et chantournées comme les gros bœufs de trait, mais ils sont encore presque sauvages. La corvée a eu du mal à les embarquer. Je suis de quart au servomoteur de 21 h à 24 h Il fait beau en mer. Dans l'après-midi en amenant les cartahus, une vareuse blanche à moi qui était au sec avec mon linge s'est trouvée toute déchiquetée presque irréparable. Il fait chaud dans les batteries, les sabords sont fermés depuis l'appareillage. Dans l'après-midi vers 13 h un vapeur américain qui se trouve en rade appareille et quitte la rade à toute vitesse.

Le 5 février 1916.

Le branle-bas a lieu à 6 h il fait déjà très chaud la nuit dans les batteries. A minuit en quittant mon quart je suis mont‚ sur le pont, je vois un feu tournant par bâbord. J'ai le quart de 7 h à 11 h, toujours au servomoteur et ce soir celui de 17 h à 21 h Les machines tournent, 74 tours. Au branle-bas de 6 h à 7 h j'aperçois la terre par bâbord, nous en sommes environ à 10 milles. Je descends prendre mon quart à 7 h A 9 h on stoppe pour visiter un voilier américain, 4 mâts à 9 h 30 on repart et continuons notre route. Depuis notre départ nous faisons cap à l'Est, nous descendons vers les petites Antilles en longeant les îles. A 11 h je monte sur le pont après avoir fini mon quart. Je vois toujours la terre, c'est l'île Saint-Domingue, elle est apparente jusqu'à 18 h, elle est très longue. Ce midi nous avons mangé des haricots blancs en salade avec du bœuf bouilli et du pâté‚ comme hors d'œuvre, puis le jus. Nous avons eu du pain Anglais aussi, il n'est pas fameux car il se conserve pas. Le matin au jus c'est des biscuits qui nous ont été servis. Les vents sont en bout, il fait beau temps cependant le bateau tangue et plonge un peu. Les lames ne sont cependant pas très longues. Dans certains passages il y a du raisin du tropique et aussi quelques poissons volants. Aujourd'hui l'heure est avancée de 12 minutes sur l'heure d'hier. A 21 h après mon quart je monte sur le pont, la nuit n'est pas excessivement noire. J'aperçois un feu tournant par bâbord milieu. Vers 19 h, toute la bord‚e de veille est rappelée au poste de veille jusqu'à 20 h, pour deux feux de deux bateaux différents à 20 h il reste une division seulement. Il fait chaud dans les batteries.

Le dimanche 6 février 1916.

Le branle-bas à lieu à 6 h Moi je suis réveillé à 2 h 45 pour prendre mon quart à 3 h jusqu'à 7 h, au même poste. A 3 h rien en vue. Biscuits au café le matin. Hier soir nous avons eu du pain du bord, il était chaud et aussi a t il été dévoré. De 7 h à 11 h je m'occupe à laver, faire sécher et réparer mon linge. Ce midi nous avons du pain du bord, rata des familles, pruneaux au vin, jus. Toujours rien en vue. Les poissons volants sont moins rares qu'hier, il fait un peu plus chaud. Toujours cap à l'Est, même vitesse, 74 tours. Vers 10 h il est tombé un grain de pluie, j'ai été surpris, juste au moment où j'allais prendre un bol d'air en moins d'une demi-minute je me suis trouvé trempé mouillé, mais complètement traversé obligé de me changer entièrement. Aujourd'hui il y a eu un communiqué du front Français par un poste de t.s.f intermédiaire, de " " A midi l'heure est avancée de 20 minutes sur l'heure d'hier. Il reste encore 480 milles à faire pour arriver à Fort de France. A 13 h bâbordais aux sacs, les jeux sont permis. Tribordais au poste de mer. A 14 h ouverture de la bibliothèque. Il est 15 h et je suis de quart de 14 h à 17 h, le servomoteur est stopper jusqu'à 16 h, je profite d'un moment pour me mettre à jour, ou du moins mettre mon cahier à jour. A 17 h rien de nouveau. Ce soir ragoût fermière, ça change un peu du rata, le rata est fait avec du bœuf et des pommes de terre, et le ragoût fermière avec des pommes de terre et du bœuf. Pour la sauce c'est la même des fois ça change c'est quand il a le goût de brûlé. Enfin pour un jeune homme de 24 ans, sans femme, ça peut étaler. A midi l'heure est avancée de 20 minutes. Les sabords ont été ouverts aujourd'hui, quelques uns seulement, le peu à beaucoup rafraîchi le bateau intérieurement. La nuit tous les sabords sont fermés, il fait chaud dans les batteries. Je ne tarde pas à aller me coucher car j'ai le quart de minuit à 3 h

Le lundi 7 février 1916.

Je suis réveillé à minuit pour moins le quart pour faire le quart de minuit à 3 h à 3 h après être remplacé je monte sur le pont, je n'aperçois rien dans la nuit. Nous avons toujours les vents de bout, le bateau tangue toujours un peu. Le branle-bas à lieu à 6 h. Au déjeuner nous avons du pain. A 7 h 30 on augmente l'allure de 74 tours à 86. A 8 h on stoppe, puis nous repartons 1/4 d'heure plus tard. La cause de l'arrêt est due aux chocs entendus dans la machine tribord en augmentant l'allure. Il y a eu aujourd'hui ce matin, à 6 h, un bœuf qui a été‚ tué, les bouchers ont eu de la peine à l'abattre. Lavage de linge et des grands sacs, briquetage de bancs et tables. Je lave quelques morceaux et les fait sécher car je suis en retard sur mon lavage. Ensuite quand il est sec je fais la couturière. A 10 h 15 je mange aux rations pour prendre le quart de 11 à 14 h. Ce midi nous avons eu chacun une sardine à l'huile purée de pommes de terre avec bœuf rôti, café. Ah! Aussi la soupe je n'en parle pas car le plus souvent elle sert pour laver la vaisselle, à moins que ce soit du bouillon gras quand il y a bœuf bouilli. A midi l'heure est avancée de 20 minutes. Le servomoteur est stoppé quand je prends le quart. A midi on le met en marche, la sonnerie pour la fermeture des portes étanches est sonnée avec celui du poste de combat. A midi trente je suis remplacé, je vais me rendre à mon poste de combat. Depuis 10 h une fumée a été signalée par la vigie. Le navire se dirige sur ce bateau qui semble suspect. A 13 h 45 ont stoppe et mettons une baleinière de sauvetage à l'eau avec son armement et un officier, tous munis du revolver, ils vont perquisitionner à bord. Je suis à mon poste de combat et pour hisser la baleinière je suis désigné pour le treuil. J'aperçois le bateau en question il n'est pas très loin. C'est un cargo assez grand battant pavillon Américain et du nom de "Montana" de New York. Avant de stopper nous lui avons fait les sommations, en hissant les signaux internationaux. Puis nous avons hissé notre pavillon car depuis notre départ de Kingston nous naviguons sans pavillon. Le cargo ne stoppe pas, alors il est tiré un coup de canon de 47 m/m sur son avant à 50 mts. Aussitôt il hisse son numéro et stoppe. Rien de suspect à bord les baleinières reviennent on reprend notre route. Le cargo en plus de ses moyens à vapeur porte trois voiles sur ses mâts, car il à trois mâts. A 14 h 15 la sonnerie de la retraite est sonnée puis 5 minutes après c'est le dégagé du poste de combat. Les sabords sont réouverts, pas tous mais ceux de tribord. Il fait chaud aujourd'hui, le soleil tape dur. Ce n'est pas un exercice, mais bien le branle-bas de combat réel car il y a des corsaires boches signalés. Ce soir un vieux rata et des confitures comme dessert. J'ai le quart de 21 h à 24 h Il fait chaud en bas dans les batteries. A minuit je monte sur le pont. Rien en vue dans la nuit, faisons cap au sud-est depuis ce matin. Il y a un peu de vent encore mais moins que dans la journée.

Le 8 février 1916.

Le branle-bas est fait à 6 h Au branle-bas je vois la terre par bâbord. Trois îles se distinguent très bien. Ce sont les îles ST Dominique Martinique et St Lucie. A 7 h on passe juste en face de St Pierre le port qui a été victime de l'éruption en 1902 à gauche je vois le Mont Pelé. Les rayons du soleil ne percent pas les nuages qui cachent le sommet du mont. Je le distingue bien mais à peu près au deux tiers de sa hauteur. Le versant sud du mont est complètement nu, il est facile de remarquer le bouleversement de terre sur tout le versant. De la ville de St Pierre il ne reste plus que des ruines, j'aperçois quelques pans de murs ou des restes de maisons, mais c'est tout, puis il est l'heure de prendre le quart, car j'ai de 7 h à 11 h On rappelle au poste de mouillage à 8 h 30, nous stoppons pour prendre le pilote, puis nous rentrons dans le port. A 9 h 30 nous sommes mouillés aux quais des transatlantiques. Aussitôt l'embarquement de charbon par les moyens de la compagnie générale transatlantique, ce sont les doudous qui font l'embarquement. En général se sont toutes des femmes. A midi l'heure est avancée de 35 minutes. A 15 h 05 le charbon est terminé, 400 tonnes ont été embarquées, à 15 h 10 poste d'appareillage, nous quittons les quais pour embosser l'arrière au Fort de l'avant port. A 17 h 30 la manœuvre est terminée. Les doudous vendeuses et blanchisseuses sont venues à bord aujourd'hui ce matin et ce soir. Je reçois une lettre très gentille de ma doudou, par l'intermédiaire d'une de ses amies. Permissionnaires du pays pour la nuit à terre depuis 17 h et aussi la 1ère division de 17 h à 21 h. Le transatlantique "Abel-Kader" de Marseille est dans le port avec un paquebot qui fait le service des îles. Ce midi nous avons du singe avec de la purée de pommes de terre et des nouilles comme dessert. Ce soir lard, pommes de terre en robe, confitures. Je suis de quart de 17 h à 21 h mais je suis libre à 17 h 30 car le service au mouillage est affiché et c'est bâbord de quart. Encore 87 h de mer de plus à écrire sur mon cahier. Heureusement que personne ne fait le charbon, ceux qui le font c'est pour distribuer des jetons aux doudous qui portent les mannes pleines. La race des noirs est sensiblement plus belle qu'à la Jamaïque; les noirs des deux sexes sont moins bien vêtus, moins richement mais ils sont plus propres, plus dociles et en général moins laids, leur caractère est doux au près de ceux que j'ai vus à Kingston. Les sabords sont ouverts partout depuis l'arrivée au mouillage. Les couleurs sont envoyées à 18 h10. Il fait un peu plus frais dans les batteries.

 

St lucie

Sainte Lucie

 

Le mercredi 9 février 1916.

Branle-bas à 5 h 15 à 6 h 15 poste de lavage. Il fait très doux le matin. A 7 h exercices de scaphandrier. Un scaphandrier breveté plonge pour visiter les arbres portes hélices, les hélices et le gouvernail. Ce matin il reste 1 h en plongée puis étant fatigué il remonte à bord. Étant toujours comme élève scaphandrier je fais partie de la corvée. La séance est remise à cet après-midi. Les doudous viennent à bord comme d'ordinaire de 10 h 45 à 12 h 30. Ma blanchisseuse est venue aujourd'hui, étant de terre demain je suis obligé de lui rendre cette visite. Pas grand mouvement dans le port. Une drague vient du fond de la baie et mouille l'ancre pas très loin de nous. Un releveur de câbles, 2 mâts est aussi près de nous, je ne sais pas comment il se nomme, c'est un Français. A 14 h la séance de scaphandrier recommence, le scaphandrier reste 2 h et demi en plongée, il continu la visite du matin puis passe à l'inspection de la coque. Ce midi nous avons eu charlotte est des bananes comme dessert. Ce soir ragoût et bananes. Je suis de quart au mouillage, aux treuils. A 19 h branle-bas du soir. Les permissionnaires de la 2ème division vont à terre de 14 h à 18 h Les doudous sont venues ce soir de 16 h 45 à 18 h. Les sabords sont ouverts partout jour et nuit. Il fait frais dans les batteries. Les couleurs ont été amenées à 18 h 10. Il est tombé quelques grains aujourd'hui, deux ou trois mais pas très gros. La montagne qui est au-dessus de Fort de France c'est découverte environ 10 minutes vers 14 h mais les nuages l'ont vite cachée, c'est la montagne rouge. Ce n'est pas la plus haute de l'île.

Le jeudi 10 février 1916.

Le branle-bas est à 5 h 15 à 6 h 30 au travail. Hier il y a eu embarquement de vivres et matériel. A 8 h les couleurs sont envoyées comme en service de rade. Le midi nous avons charlotte pour dîner, figues comme dessert. Les doudous viennent à bord comme de coutume. Permissionnaires 3e division. Je suis enfin permissionnaire de 14 h à 18 h. Étant à 4 h d'appareillage, les permissionnaires ne peuvent descendre que 4 h à terre. Je vais rendre visite à ma doudou. Elle veut me retenir à manger avec elle mais comme je rentre à 18 h je lui fais comprendre que je n'aurai pas le temps et ne lui promets pas. Elle n'est pas satisfaite de mon refus puis je la quitte vers 16 h, nous sommes bons amis quand même. Je fais un tour en ville c'est joli, les rues sont bien alignées mais un peu trop étroites. La ville est assez étendue. J'ai vu dans ma promenade à peu près tous les bâtiments municipaux. La ville parait vieille et bâtie à la Française. Dans la ville les maisons sont bâties en pierre et en briques, dans les faubourgs il y en a aussi mais moins, les fondations sont en pierres ou briques jusqu'au raz de la terre ou à 50 centimètres au-dessus puis le reste de la maison est en bois. J'ai vu quelques quartiers nègres, c'est aussi bien curieux. Ils se trouvent presque tous aux pieds des montagnes. C'est rigolo de voir ce nombre indéfini de petites cabanes dans une route sur le versant d'une montagne, dans un endroit les cabanes sont alignées, dans un autre elles sont en cascades, plus loin c'est un grand bâtiment, je dis grand parce qu'il fait deux ou trois fois la longueur d'une seule cabane, ce bâtiment, (en planches généralement) est divisé en deux ou trois appartements avec une cloison qui monte au deux tiers de la hauteur du plafond puis le reste c'est des barreaux en bois. Devant chaque appartement il y a une porte et une ou deux fenêtres. Il n'y a de communication intérieure que par les barreaux de la cloison. Alors dans chaque appartement habite un ménage. Il y a un rideau ou un paravent qui sépare le logement en deux qui forme la cuisine et la chambre à coucher. Dans certains de ces villages les femmes s'offrent et se donnent facilement et pour rien, quelques pièces de monnaie suffisent pour abuser ainsi d'une femme. Je ne l'ai pas fait, d'abord parce que je peux me contenter avec ma doudou, mais je l'ai vu faire en me promenant. J'ai vu aussi le marché couvert, c'est grand et bien installé, si ce n'est que la couleur des marchands je me serais cru dans un marché en France. Je reviens sur la Savane vers 17 h je passe à la poste puis je vais manger au grand Hôtel. Là je retrouve des amis du bord, puis deux jeunes hommes avec qui pendant notre dernier et aussi premier séjour à Fort de France nous avions eu un match de Football. Nous causons ensemble assez longtemps puis après dîner il est l'heure de rentrer à bord. J'ai très bien manger, servi par une noire, la cuisine est soigneusement préparée, enfin très appétissante. Premièrement, potage, ensuite poissons frits, excellent, bifteck aux pommes, omelette au rhum, salade cresson, gruyère, bananes, oranges, bananes confites, café. Comme boisson c'est du vin rouge avec de la glace à volonté ! Inutile de se déranger, à table après avoir mangé on m'apporte une coupe contenant de l'eau pour me laver les mains. Le dîner est à prix fixe, 3 F 50. Il est près de 18 h il faut rentrer à bord, je m'oriente et prends la direction du Fort St Louis parce que la rentrée à bord est par ce Fort. Je suis très heureux de mon après-midi. A bord rien de changer. J'arrive pour embarquer dans la chaloupe juste au moment ou on amène les couleurs. Après m'être changé je monte sur le pont, les doudous ramassent leur marchandises pour partir. Vers 19 h il tombe un grain assez Fort qui m'oblige presque de descendre dans les batteries. Les sabords sont toujours ouverts, il fait frais. Le transatlantique "Abel Kader" est rentré dans le bassin du radoub pour se faire caréner probablement.

Le vendredi 11 février 1916.

Branle-bas à 5 h 15 briquages de bancs et table, lavage de linge. Dès ce matin il tombe un grain comme je suis à briquer bancs et tables. Poste de lavage et travail à 7 h 45. Il tombe quelques grains dans la matinée. Les doudous viennent à bord comme d'habitude. De 14 h à 16 h permissionnaires 2ème division. Rien de nouveau, le midi rata, figues comme dessert. Le soir rata macaroni et nouilles au gratin comme dessert, c'est du luxe aussi il en passe plus par la manche à ordures qu'il en est mangé. Vers 18 h un bâtiment Anglais est signalé aux sémaphores. Bas l'ouvrage à 17 h 45. Poste de sécurité à 18 h 30. Branle-bas du soir à 19 h La nuit est assez fraîche en bas dans les batteries.

Le 12 février 1916.

Le branle-bas est à 5 h 15. A 6 h 30 à l'ouvrage. Changement de grands sacs. Inspection du commandant en chef en blanc, bonnet de travail avec coiffe à 9 h 45. Je suis exempt d'inspection pour travailler sur l'arbre de transmission de l'atelier. A 11 h une liste de changement de numéros est affichée pour le service machine. Je change de numéro. Je prends 143 pour 741. Mon poste change aussi au lieu d'être à la sécurité je suis à l'extérieur, je suis absolument au même endroit mais le nom change. Les doudous viennent à bord ce midi comme d'habitude, leur marchandises est vite vendue car il est question d'appareillage. Un courrier pour la France doit partir cet après-midi. Un avis est affiché. La dernière levée sera faite à 15 h A 13 h allumage des feux le deuxième quart descend car il est d'allumage. Je suis de quart jusqu'à 14 h Les doudous reviennent à bord jusqu'à 16 h depuis 15 h, il ne leur reste plus de marchandise pour partir du bord. A 17 h appareillage, nous passons devant Fort de France et contournons l'île en laissant la terre à gauche. Nous faisons cap au sud, les vents sont en bout, la lame est assez profonde, le bateau tangue légèrement, il roule aussi un peu. A 18 h 30 nous croisons un vapeur, il nous envoie ses couleurs par projecteurs en passant. Je suis sur le pont à bâbord au moment même où il se fait reconnaître je vois très bien les couleurs, bleu, blanc, rouge. Ensuite il fait du Scot avec la "Marseillaise". Il parait assez grand et se dirige sur Fort de France. Je suis de quart au servomoteur de 21 h à 24 h Rien de nouveau pendant mon quart. Les machines tournent 56 tours. Je suis remplacé à minuit trente mon remplaçant ayant changé de numéro comme presque tout le personnel mécanicien, l'homme qui devait le réveiller ne l'a pas trouvé. A minuit juste un incendie s'est déclaré à bord dans la soute à matériel du maître de manœuvre. La soute a été noyée aussitôt et l'incendie maîtrisé. A 2 h le matin tout était fini. Le feu avait pis dans un sac de chiffons et d'étoupes. Il n'a pas été rappelé de poste de sécurité. Le faux pont arrière était empesté par la fumée et l'eau était à une hauteur de 15 centimètre dans la tranche M.

Le dimanche 13 février 1916.

Le branle-bas est à 6 h, je reste sur le pont jusqu'à 7 h Rien en vue à l'horizon. Même temps qu'hier le bateau roule et tangue toujours un peu. A 7 h je descends remplacé au quart car j'ai de 7 h à 11 h au servomoteur. A 9 h on stoppe et passons de la manœuvre hydraulique à la manœuvre à bras comme de coutume en temps régulier. A 11 h je suis remplacé. Charlotte au dîner, potée et jus. A 13 h, bâbordais aux sacs, les jeux sont permis. L'heure n'est pas avancée ce midi. Il fait chaud sur le pont et on ne peut monté sans le casque. Ce soir j'ai le quart de 17 h à 21 h. Ce soir un vieux rata et des confitures comme dessert. La viande n'est pas fameuse et parait décomposée mais comme il faut manger pour se donner des forces. J'ai mal à la tête et à l'estomac toute la soirée et toute la nuit, beaucoup de collègues ressentent le même malaise. Je l'attribue au repas du soir. Les sabords sont entrouverts le jour. Pas tous mais ceux du milieu du navire. La nuit la chaleur n'est pas insupportable comme elle l'a été. Les machines ont ralenti l'allure, elles ne tournent plus que 45 tours. Nous faisons des ronds dans l'eau je ne sais trop à quel point.

Le lundi 14 février 1916.

Je suis réveillé à 2 h 45 pour prendre le quart à 3 h. Je passe 3 à 7 h au servomoteur. J'ai toujours mal à la tête et à l'estomac, j'ai des aigreurs et des envies de vomir constamment. Branle-bas à 6 h Briquetage de bancs et tables, lavage de linge et des grands sacs. Ayant toujours mon malaise je lave mon grand sac et je laisse le reste à laver pour plus tard. Ce midi nous avons du singe purée et confiture, café comme tous les midis. Nous tournons toujours, l'allure des machines varie de 45 à 55 tours. Toujours rien en vue. Le temps est le même. Les vents sont pas très puissants mais il y a de la houle. Le navire tangue et roule toujours. Les sabords sont entrouverts du coté opposé à la vague. Mon mal de tête se dissipe dans l'Après-midi. Je suis de quart de 14 h à 17 h Quand je prends mon quart le servomoteur est stoppé. A 15 h il est mis en marche et la commande à bras passe à la commande hydraulique. Ce soir lard pommes de terre en robe, figues. Le branle-bas du soir est à 18 h 45. Je me couche aussitôt car je suis fatigué. A minuit moins le quart je suis réveillé pour descendre. Il fait bon, pas trop chaud dans les batteries la nuit.

Le mardi 15 février 1916.

J'ai le quart de minuit à 3 h à 3 h je monte sur le pont prendre un peu d'air frais, je ne remarque rien dans la nuit, puis je retourne me coucher jusqu'à 6 h. Ce matin il n'y a pas lavage de linge mais je réussi à laver quelques morceaux, je les mets au sec et les ramasse de bonne heure car ils sont vite secs. Rien en vue, toujours des ronds dans l'eau, même temps, le navire roule et tangue sans cesse. A midi bœuf bouilli aux pommes de terre en robe, pâté, café. Le bœuf n'est pas trop mauvais. La viande est tout au moins fraîche puisque la bête à été abattue ce matin. Je suis de quart de 11 h à 14 h. Le servomoteur est stoppé. Ce soir bœuf en ragoût avec des haricots blancs, pruneaux au vin comme dessert. Je suis de quart de 21 h à 24 h Les sabords n'ont pas été ouverts comme d'habitude cet après-midi, il fait déjà chaud dans les batteries la nuit.

Le mercredi 16 février 1916.

Branle-bas à 6 h La terre est en vue depuis 5 h ce matin. J'aperçois la terre par bâbord. Je dois descendre au quart à 7 h puisque j'ai 7 à 11 h au servomoteur. A 6 h le navire est en face du mont Pelé et il passe très près de la côte. Rien à voir du mont Pelé, les nuages sont tellement bas qu'ils le cachent presque entier. A 6 h 35 il passe tellement près qu'à l'œil nu je distingue très bien les ruines. Le fait est très curieux. Les maisons sont toutes rouges, toutes déchiquetées, les murs ne sont que des amoncellement de pierres, tout est bouleversé. Quelques maisons sont rebâties, elles se distinguent singulièrement des ruines rien que par leur couleur. Je peux aussi remarquer la lave du volcan ou du moins son passage. On croirait une route sur laquelle on a semé des cailloux peints en rouge clair, il y a plusieurs passages comme ça, tout le versant sud du mont en est rempli c'est très drôle à voir. Le navire suit la côte de très près, tout le long de celle-ci il y a des petits villages, beaucoup de cannes à sucre et d'usines où on la travaille. A 7 h je descends au quart. Depuis 6 h 15 un cargo est en vue par l'avant du bateau. A 7 h 05 branle-bas de combat. A 8 h 15 on sonne la retraite Après avoir été perquisitionner à bord comme d'habitude. Nous avons stoppé pour mettre et reprendre la baleinière. C'est un cargo, Norvégien, une cheminée, il a un chargement de charbon. Nous repartons et arrivons … Fort de France à 10 h au mouillage. A midi lard pommes de terre en robe, confitures et jus. A midi 45 corvée de charbon par les moyens du bord, 200 tonnes de cardiff. Les mécaniciens et chauffeurs ne font pas tous parti de l'embarquement. Le "Descartes" est accosté près du Fort St Louis. Le paquebot "Antilles" de Fort de France est rentré ce matin venant de Guyane. Le paquebot postal Français "Haïti" du Havre est rentré avec le courrier de France. Il est arrivé‚ sur rade vers 14 h 30. A 17 h permissionnaires de la 1ère division à l'appel, le charbon est fini. Étant maintenant de la première division depuis le changement de numéro je vais à terre de 17 h à 21 h comme les autres. Je vais chez ma blanchisseuse puis retrouve des camarades sur la Savane avec lesquels je dîne au grand hôtel. Il se fait plus de 19 h quand nous nous mettons à table Après avoir déguster l'apéritif. Nous conversons d'un fait et d'un autre si bien que 21 h menacent de sonner. Il faut rentrer, naturellement il n'y a pas à hésiter, nous rentrons tous à l'heure. La "Marseillaise" est mouillée au large, au même endroit que la première fois que nous sommes arrivés à Fort de France. Les feux sont à 90 minutes dans plusieurs rues. Le soir à 21 h j'ai une lettre du courrier de France, je m'étonne de n'avoir que celle là, elle est datée du 9 janvier et vient d'un de mes camarades, dans une ambulance sur le front, secteur postal 102. Encore 89 h de mer à enregistrer.

Le jeudi 17 février 1916.

Je suis réveillé à 3 h pour prendre le quart, car j'ai 3 à 7 h au servomoteur. A 3 h 30 les feux sont poussés, on réchauffe les machines, à 6 h 30 appareillage. Nous allons à la place du "Descartes" qui lui appareille. A 5 h est sonné le branle-bas. A 7 h chacun à son poste nous ne sommes pas encore arrivés au mouillage, vers h la manœuvre est terminée. Aujourd'hui, service au mouillage, je suis de quart aux treuils. A midi, charlotte, bananes, jus. Le "Haïti" transatlantique est rentré faire son charbon dans les quais de la compagnie, ce matin et il repart cet après-midi, il est 14 h quand il part en rade. Ce soir, rata macaronis, riz au lait, (prétendu au lait)Changement de hamacs pour les deux bord‚es et changement de poste de couchage pour les hommes ayant changé de numéros. Je change de cornière de couchage et je couche plus sur l'avant. Le vaguemestre affiche un avis, provenant qu'un courrier partirait pour la France demain. La dernière levée sera faite à bord à 10 h Les doudous sont venues à bord comme d'habitude. Cette nuit les sabords sont ouverts toute la nuit ça ne fait pas de mal, ça change un peu il fait meilleur dans le hamac.

Le vendredi 18 février 1916.

Branle-bas à 5 h 15, lavage de hamacs pour les deux bordées. Briquetage de bancs et tables jusqu'à 7 h 45. Je lave mon hamac et le mets sur un cartahut. Dans la matin‚e le paquebot de la compagnie générale transatlantique, le "Pérou" du Havre vient charbonner aux quais de la compagnie. Le "Haïti" est parti hier dans la soirée pour Colomb. Le courrier devant partir pour la France est retard‚ et partira demain, la dernière levée sera faite à 8 h demain. A 12 h 15 inspection des plats. Le clairon sonne pour faire ramasser le linge pendant l'inspection de plats, celle-ci est annulée. Le linge est bien sec. Il tombe plusieurs grains dans l'après-midi. Le matin il en est tombé aussi mais moins. Les doudous viennent à bord comme d'habitude de 10 h 45 à 12 h 30 et de 16 h 45 à 18 h. Ce midi nous avons eu la charlotte et bananes à dîner et le jus. Ce soir ragoût aux fayots, pâté. Cette nuit j'ai nuit franche, je reste prendre le frais sur le pont jusqu'à 22 h Je suis heureux de m'apercevoir que depuis un petit moment j'oublie de faire usage du tabac. Il m'arrive de ne plus fumer que très peu même il se passe des jours ou je ne fume pas du tout. Il fait assez frais dans les batteries.

Le samedi 19 janvier 1916.

Branle-bas à 5 h 15, 6 h 15 poste de lavage. Changement de grands sacs. Inspection du Commandant en blanc, bonnet avec coiffe, à 9 h 45. Je passe l'inspection aujourd'hui. Les doudous montent à bord aussitôt l'inspection terminée. A dîner ce midi nous avons des fayots et la broche, bananes et jus. Dans la matinée le "Pérou" qui est venu charbonner hier, quitte les quais et appareille avec le courrier pour la France, il est environ 10 h. Embarquement de bœuf à bord dans la matinée. Il est question d'appareillage pour demain. A 15 h 45 je me change pour aller à terre. L'équipe de football descend de 16 à 18 h Sur la Savane cette équipe fait de l'entraînement entre elle, faisant partie du foot je prends ma place. A 18 h nous rentrons tous à bord, nous n'avons eu juste que le temps de prendre l'apéritif. Rien de nouveau dans la soirée. Poste sécurité à 18 h 30, ensuite branle-bas du soir. Je me couche de bonne heure car je suis un peu fatigué.

Le dimanche 20 février 1916.

Branle-bas à 5 h 15, à 6 h 15 poste de lavage. Du branle-bas au poste de lavage, je me rase, blanchis mon casque et cire mes souliers. A 6 h 15 au travail jusqu'à 7 h 15. A 7 h 15 permissionnaires 1 ère division à se laver et changé à 8 h à l'appel. L'équipe de foot descend pour faire de l'entraînement. Je suis permissionnaire mais je vais jouer sur la Savane avec mes collègues. Quelques civils jouent avec nous pour s'amuser. Je vais faire une tournée du côté de chez ma blanchisseuse, elle n'est pas chez elle une parente étant malade l'a réclamée près d'elle. A 11 h je rentre à bord avec les autres permissionnaires. Je prends ma semaine de plats aujourd'hui. Pour commencer, bœuf bouilli, pommes de terre en robe, bananes et jus. A bord une camarade à moi me rapporte mon linge que j'avais donné à blanchir. A 13 h, le troisième quart descend à son poste, on allume les feux. Appareillage à 17 h pour changer de mouillage. Les hommes de bonne conduite, non de quart et des divisions non de terre peuvent aller à la messe à terre à 10 h, ils sont conduits par des seconds maîtres et ramenés de même. Ce soir rata haricots, sardines à l'huile. Je suis de quart de 17 h à 21 h au servomoteur. Je ne suis pas sur le pont quand on appareille, je ne sais pas de quel bord on laisse la terre. J'ai un peu mal à la tête ce soir, j'attribue cela à un verre de rhum, j'ai voulu le goûter avec et sans eau mais il est tellement fort qu'il m'a presque tué.

Le lundi 21 février 1916.

Je suis réveillé à 2 h 45 pour prendre le quart, j'ai de 3 à 7 h, 14 h à 17 h aujourd'hui. Nous faisons cap au sud-est les machines tournent 56 tours. Les vents et la lame par tribord avant à 7 h je monte sur le pont prendre un peu d'air. Rien en vue à l'horizon. Le branle-bas à été fait à 6 h briquage de bancs et tables lavage de linge et des grands sacs. Je lave quelques morceaux de linge, il ne pleut pas, il est vite sec. Le navire tangue beaucoup. Il n'y a pas trop de malade cependant il roule aussi un peu, la lame est longue et profonde, les vents sont assez forts. A midi, déjeuner fantaisie, rata macaronis, nouilles, soupe aux nouilles. J'ai de 14 h à 17 h et descends prendre mon quart. Rien de nouveau le servomoteur est stoppé et il est mis en marche à 16 h Ce soir broche purée, riz. Le branle-bas du soir est fait à 18 h 30 à 19 h je vais me coucher car j'ai un quart dans la nuit. A minuit je suis réveillé, j'ai de minuit à 3 h au servomoteur.

Le mardi 22 février 1916.

A 3 h je monte sur le pont et scrute l'horizon, rien dans la nuit. Il fait de grands vents, le navire tangue. Le branle-bas est fait à 6 h, de 3 à 6 h je me suis couché. Même route et même temps qu'hier. Je mange aux rations car j'ai de 11 h à 14 h en bas. Le servomoteur est stoppé, la conduite du navire est assurée par la manœuvre à bras comme d'ordinaire, de h à 16 h, quand il n'y a rien d'anormal. Ce midi, nous avons eu du lard aux pommes de terre en robe et des confitures, jus. Hier au jus du matin nous avons eu du biscuit et ce matin du pain. Ce soir, singe au riz au gras, pâté. J'ai de 21 h à 24 h au servomoteur. A minuit je monte sur le pont, rien de nouveau dans la nuit. Il fait chaud dans les batteries la nuit.

Le mercredi 23 février 1916.

Branle-bas à 6 h J'ai le quart de 7 à 11 h. Ce midi bœuf bouilli, purée, bananes et jus. Ce soir ragoût de bœuf aux haricots, nouilles au gratin. Je mange aux rations, j'ai le quart de 17 à 21h. Il y a une quantité de poissons volants. La lame est bâbord avant. Nous faisons cap un peu plus au sud. Les vents sont forts, le navire tangue et roule passablement. Dans l'Après-midi le navire tourne un peu plus au sud, la lame et les vents sont presque en travers de bâbord. Dans l'Après-midi j'étais bien tranquillement assis sur le pont à bâbord, lorsqu'un embrun m'est tombé dessus et m'a englouti sous son poids. Il fait chaud dans les batteries.

Le jeudi 24 février 1916.

Je suis réveillé à 2 h 45 j'ai le quart de 3 à 7 h. J'ai mal à la tête et je commence à être fatigué. Toujours rien de nouveau. Les hommes du pont font passablement d'exercices depuis quelques jours. École de combat, école par spécialité, exercice au fusil et gymnastique. Rien pour le service machine. Beaucoup d'hommes passent la visite, la nourriture manque et l'anémie va régner parmi l'équipage. Pour mon compte je sais que mes forces s'épuisent, je n'ai plus d'appétit, quand j'aperçois le repas sur la table j'ai de suite mangé sans y toucher. Les pommes de terre sont pourries, les haricots sont‚chauffés, le pâté est coulant et presque décomposé. Avec ça les fatigues du quart et de la mer c'est bien compréhensible. Ce midi ragoût de bœuf aux haricots, sardines et jus. Je suis de quart de 14 h à 17 h. Rien en vue. Ce soir macaronis en ragoût avec du bœuf, riz (prétendu au lait et brûlé) A minuit moins le quart je suis réveillé, j'ai le quart de minuit à 3 h. A minuit je remarque sur le compas de la barre à bras que nous avons changé de route, nous faisons cap à 80° Ouest, ce qui fait presque un demi-tour. Nous avons les vents et la lame par tribord arrière. A 3 h je monte sur le pont prendre un peu d'air. Rien de nouveau dans la nuit.

Le vendredi 25 février 1916.

Branle-bas à 6 h comme de coutume. Du branle-bas à 9 h 10, lavage de linge, briquetage de bancs et tables. Je lave quelques morceaux de linge et brique la table en même temps. A midi singe pur‚e, pruneaux aux vin, jus. Je mange aux rations, j'ai le quart de 11 à 14 h. Le servomoteur est stoppé. Toujours rien en vue. Ce soir ragoût de lard aux haricots, bananes. Je me couche à 18 h 30 au branle-bas du soir. Pas moyen de se reposer, il fait une chaleur insupportable dans les batteries. Tous les sabords sont fermés depuis 17 h le soir et il ne sont pas ouverts en grand nombre dans la journée. Je suis réveillé à 20 h 45 j'ai 21 h à minuit, je suis en nage dans mon hamac. En remontant du quart à minuit je vais dormir dans mon hamac, je le dispose comme je puis, accroché aux rambardes sur le pont et je dors jusqu'au matin à 6 h. Là il fait frais quoique le vent est chaud mais il vient par l'arrière. Dans la nuit il tombe un petit grain mais je reste couché quand même. Quand je me réveille j'ai deux compagnons au près de moi.

Le samedi 26 février 1916.

Branle-bas à 6 h. Hier matin il a été abattu un bœuf. Toujours rien en vue. Même cap qu'hier et aussi mêmes vents, plutôt un peu moins forts. J'ai le quart de 7 h à 11 h. A 9 h 45 inspection en gris pour les hommes du pont, en bleu de chauffe avec casque pour les mécaniciens et chauffeurs du 1er quart. Ce midi rôti de bœuf haricots, sardines à l'huile et jus. Je monte sur le pont après dîner. Pas très loin de nous par bâbord je vois un banc de marsouins, jamais je n'en avais autant vu ensemble, sur une longueur de plus d'un mille ils se découvraient et venaient vers le navire. A 14 h 30 visite sanitaire pour les bâbordais du pont et les mécaniciens et chauffeurs des 1er et 2ème quart. Hier c'était pour les tribordais, mécaniciens et chauffeurs du 3ème quart et les disponibles. Tout le monde y passe. Ce soir je mange aux rations, j'ai le quart de 17 h à 21 h. Ragoût de bœuf aux macaronis, pruneaux au vin. Je termine ce soir ma semaine de plat, et je n'en suis pas fâché. A 21 h je quitte le quart. Je vais dormir dans mon hamac que je croche sur l'avant du navire dans les batteries hautes. Il fait un peu plus frais que dans la batterie basse, à mon poste de couchage je ne peux résister il fait trop chaud. Après 21 h, ordre des docteurs il est défendu de rester sur le pont.

Le dimanche 27 février 1916.

Je suis réveillé à 2 h 45, j'ai le quart de 3 à 7 h. En montant mon hamac aux bastingages je scrute dans la nuit mais toujours rien. Le branle-bas est fait comme d'habitude à 6 h. Lavage du linge pour les mécaniciens et chauffeurs des 1er et 2ème quart, jusqu'à 7 h 45. Je lave quelques morceaux. Après avoir été remplacé. Il fait très chaud, pas moyen de monter sur le pont sans son casque. Même temps, même vents et même cap qu'hier. Il y a toujours de la houle de fond. Le navire tangue et roule toujours un peu mais pas de trop. Ce midi ragoût de bœuf haricots, sardines à l'huile et jus. Après dîner je monte sur le pont prendre un peu d'air, les poissons volants ne manquent pas. Il fait chaud, à l'ombre il fait assez frais mais le vent est chaud quand même. A 14 h je descends prendre mon quart j'ai de 14 h à 17 h au servomoteur. Pour souper ce soir nous avons du bœuf en daube purée, macaronis au gratin comme dessert. Il n'y a pas moyen de fixer les yeux sur le dessert, il est trop appétissant. Enfin! Le bateau fait cap presque au Nord. L'allure a été diminuée hier soir, de 66 tours que tournaient les machines, c'est maintenant 54 tours. Elles sont diminuées encore ce soir de 54 à 42 t. Je vais me coucher au même endroit qu'hier soir, car dans la batterie basse il n'y a pas moyen de résister à mon poste de couchage. A minuit moins le quart je suis réveillé j'ai minuit à 3 h. En quittant le quart je monte sur le pont, je n'aperçois rien dans la nuit.

Le lundi 28 février 1916.

Branle-bas à 6 h. Briquage de bancs et tables, lavage de linge par bordée. Je brique la table et lave un morceau de linge. Vers 6 h 45, la vigie signale un bateau à l'horizon. De suite nous prenons le cap sur ce bateau que je ne peux pas voir à l'œil nu car il est trop loin, l'allure est augmentée, de 42 à 86 tours. la lame est longue, les vents sont forts et il y a de la houle. Le navire tangue et roule passablement. L'eau embarque sur la plage avant. Le bateau signalé par la vigie est un petit voilier battant pavillon Anglais. Il a deux mâts et peint en blanc. A bord il est signal‚ de stopper, il est 9 h 30. Il stoppe aussitôt. Les timoniers font des signaux à bras, nous ne nous arrêtons pas et le voilier repart. Ce midi je mange aux rations, j'ai le quart de 11 à 14 h. Pour dîner, fayots, ragoût de bœuf. Les fayots ne valent rien, ils sont échauffés, depuis un moment déjà ils possèdent ce goût détestable, pruneaux au vin et jus. De 14 h à 21 h je suis au repos, je monte sur le pont, il y fait chaud. A 16 h un voilier dans le genre que celui que nous avons rencontré ce matin, est près du bord. Il porte le pavillon Hollandais. A bord on lui signale de stopper mais n'y prend pas attention. Le temps est limité, il ne stoppe toujours pas. A bord nous tirons un coup de canon de 47/mm par tribord. Cette fois il stoppe. La "Marseillaise" aussi arrête et comme pour les bateaux suspects et étrangers, une baleinière va à bord, elle revient puis nous repartons. Ce soir singe purée, bananes (pas mûres) J'ai le quart de 21 h à minuit. Je suis toujours à l'avant pour dormir. En quittant le quart je monte sur le pont, rien dans la nuit.

Le mardi 29 février 1916.

Branle-bas à 6 h. Rien en vue, cap au nord. A 7 h je descends prendre le quart de 7 à 11 h. Pendant mon quart il est fait un exercice de combat. Un but à été mis à l'eau et sert pour faire des tirs au tube. La lumière électrique manque, c'est un exercice, les dynamos ont été stoppées. A 11 h c'est paré pour l'exercice et nous repartons car nous avons stoppé les machines aussi, pendant 1/2 heure environ. A midi nous avons du rata de fayots échauffés avec du lard puant et écœurant, un demi-maquereau à l'huile par homme et du jus, il y a aussi la soupe qui peut servir pour laver la vaisselle. Total sur tout ce menu qui est assez souvent répété il y a un demi-maquereau qui peut être présenté. Dans l'Après-midi vers 14 h 30 je vois la terre par bâbord avant. C'est l'île St Vincent nous nous en rapprochons assez près. A 16 h nous sommes environ à trois milles et je distingue très bien la côte. C'est montagneux comme toutes les îles des Antilles, la côte est accidentée, j'aperçois quelques maisons dans une vallée, parmi les bois et la verdure car la côte est bien verte. Comme sur toutes les montagnes des îles, les nuages voilent les sommets de celles qui sont un peu élevées. Nous contournons l'île pendant un petit moment. L'île Sainte Lucie est en vue par tribord mais ce n'est que derrière un voile qu'elle apparaît. Je suis de quart de 17 h à 21 h. Je me trouve à monter sur le pont vers 17 h 30, le soleil commence à cacher ses rayons et de ses derniers jaunes clair qu'il envoie fait un tableau merveilleux sur la montagne, les nuages qui la couvrent se colorent, la verdure de la côte devient sombre et la mer qui vient briser ses lames sur quelques rochers en s'avançant comme un troupeau de moutons, donnerait à un peintre un valeureux élément. A 21 h en quittant le quart je monte sur le pont, j'aperçois deux feux tournants, deux éclats, par tribord. Ils ne paraissent pas très loin, je ne vois rien par bâbord. Je ne reste pas longtemps, car le vent souffle dur, je ne le trouve pas bien chaud car je suis en sueur. Je couche toujours à mon poste de couchage de fortune. A 2 h 45 je suis réveille‚ j'ai 3 à 7 h.

 

 

Date de dernière mise à jour : 14/09/2020

Ajouter un commentaire

Anti-spam